Et oui encore une histoire de grand-mère ! Il faut dire que les miennes avaient tout pour plaire et ont contribué à faire de moi une mère de carrière. Puis elles ont parfois payer cher leur tribut de mère. Je dois avouer, que je suis impressionnée de voir à quel point les choses ont changées au cours du siècle dernier. Le statut de la femme a été reconnu et celui de la mère... en a perdu. Mais ainsi va la vie, avec des pas en avant et d'autres en arrière jusqu'à ce que nous soyons toutes libres et fières de nous réaliser chacune à notre manière.
Ma
grand-mère a 85 ans… 85 ans de plus que mon bébé en gestation*, dans mon bedon.
Ma
bedaine pleine de vie, je pense à elle et à toutes ses chandelles.
Ma
grand-mère a eu trois garçons, tricotés serrés fait maison. Elle en a élevé
deux autres, selon les saisons, presque adoptés par nécessité. Elle a goûté
aussi 3 fois aux broches à tricoter… sans bébé à la clef.
Des
petites vies pourtant bien accrochées, déjà installées dans son cœur de maman
dévouée, mais arrivées au mauvais moment, un temps sans argent, un temps ou
tout est compté tout le temps, serré dans le temps. Un temps ou les heures
travaillées n’arrêtaient jamais, n’étaient jamais assez, jamais assez payées.
Pourtant ma grand-mère en plus de ces garçons, elle ne chômait pas, la maison
ici, l’épicerie là ! Les enfants d’un côté, les clients coûte que coûte, les
factures empilées, mon grand-père sur la route. Alors la dame arrivait, avec
ses broches à tricoter, supprimait ce que l’on ne pouvait se permettre de
désirer… puis repartait comme si de rien était et la vie reprenait. Pas le
temps de s’apitoyer, fallait travailler, nourrir la maisonnée… n’empêche que
dans son cœur, ma mamy a dû avoir peur, regretter ses bébés décrochés, pleurer
sa blessure qui ne se guérit pas à l’usure. Et pourtant elle a continué son
ascension, de s’occuper de ses garçons, de garder ceux des environs.
Quand
mon bébé sera né, je lui déposerai dans ses vieux bras fatigués.
Pour, lui, elle a tricoté serré !
Pour lui, elle a ressorti ses broches à tricoter, jadis délaissées et elle a confectionné des gilets, des bonnets, des chaussons à cordons, une couverture pleine de ses murmures… une vraie layette de bébé, souhaité, désiré, attendu, voulu.
Pour, lui, elle a tricoté serré !
Pour lui, elle a ressorti ses broches à tricoter, jadis délaissées et elle a confectionné des gilets, des bonnets, des chaussons à cordons, une couverture pleine de ses murmures… une vraie layette de bébé, souhaité, désiré, attendu, voulu.
Une maille en avant, une maille en arrière, moment émouvant, moment amère… mais toujours mère, puis grand-mère et même arrière grand-mère maintenant de tous ces enfants portés au fil du temps.
Ma
grand-mère a 85 ans, elle a tricoté pour mes trois enfants… tricoté serré
l’héritage de sa vie usée.
* J'ai écrit ce texte il y a déjà presque 4 ans et la vie m'a gâtée car j'ai pu déposer mon bébé dans ses bras fatigués... j'ai vu briller ses yeux voilés, et savouré le bonheur de la contempler comme si le temps s’était arrêté.
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