mercredi 14 octobre 2015

Un monde qui ne sait plus vivre avec ses enfants

J’arrive du festival du féminin qui se tenait en fin de semaine  dernière à Montréal, où je me suis rendue avec Petit Caillou pour donner un atelier et tenir une tente rouge ! Je vous reparlerai du festival bientôt ! En attendant incursion ethnologique dans une société qui n’ose plus vivre avec ses enfants. Parce que oui, je suis allée au festival en compagnie de mon Petit Caillou de 4 ans !

Nous sommes donc partis de bon matin de notre Saint-Loin du Loin Loin afin de nous embarquer pour 8 heures de bus et gagner la métropole ! Premier constat, même si j’y avais pensé sans réussir à fonctionner autrement malgré tout, j’allais manquer de bras ! Et oui, on partait pour trois jours, ce qui implique quelques vêtements et brosses à dents, auxquels il faut immanquablement ajouter quelques jeux lorsqu’on voyage avec un bambin de 4 ans, que l’on a 8 h de bus à faire, 3 jours d’ateliers, dont deux au cours desquels nous aurons à intervenir ! S’ajoute le fait que le dit bambin est difficile à nourrir et qu’il est plus simple d’emmener ce qu’il accepte de manger, plutôt que de devoir partir chasser entre deux ateliers ! J’avais donc une valise… une trop grosse valise, un sac à l’épaule afin d’avoir de quoi jouer, manger et patienter pendant les 8 h de bus et … mon bâton de lune ! Un bâton d’1.60m largement emmitouflé afin de préserver sa préciosité ! Manquait une main pour tenir celle de mon bambin !!! Tant pis, à 6h du matin et à St-Loin du Loin du Loin Loin on ne craint pas trop les méchants, kidnappeurs d’enfants ! Ainsi on a réussi à embarquer, tout doucement le bus s’est ébranlé… Pendant, 8h de temps !

Ainsi, nous avons fait notre vie et récolté bien malgré nous quelques commentaires quand à notre façon de faire ! « C’est qu’il parle bien votre enfant, il est drôlement patient ! » « Merci de nous avoir divertit ! » (De rien c’est un plaisir de savoir que nous avons été écoutés et épiés pendant tout le trajet). Une fois débarqué du bus, la vraie aventure a commencé ! Dédales d’escaliers dans le métro bondé pour saluer notre arrivée !

Rituel d’ouverture, table ronde, souper, soirée, tout s’est enchainé à grand coup de tétées, de biscuits à grignoter et de casse-tête à assembler pour s’occuper.  Tout c’est bien passé sous les yeux ébahis des femmes rassemblées;
« Bien dites donc ce qu’il est  calme votre enfant, il est vraiment patient ! », comme si c’était une épreuve de torture que d’être sur les genoux de sa maman pendant un petit moment ! « Coudon, tu es bien mignon, on ne t’a pas entendu, ma fille n’aurait jamais tenue! », et vlan dans les dents de l’enfant absent ! Madame le savez-vous vraiment ? Avez-vous déjà essayé ? Avez-vous seulement osé ? Et puis pourquoi un enfant sage est un enfant que l’on a pas besoin d’écouter, duquel il n’est pas nécessaire de s’occuper ?
« Tu restes avec maman, tu n’es pas trop fatigué, tu ne voudrais pas aller te coucher ? »,
C’est vrai que de s’endormir dans les bras de maman est vraiment affligeant, alors qu’il pourrait être couché accompagnés de monstres sous son lit, la porte fermée et une lumière pour le veiller !
« Mais il est parfait ce petit ! », parfait une fois endormi, mais avouez qu’il vous a terrorisé lorsqu’il est arrivé !
Ce qui est fou dans ce genre de propos, c’est qu’il est totalement impensable d’envisager que l’enfant puisse s’amuser, que l’on ne soit pas une mère névrosée, ou même d’accepter que l’enfant aurait pu faire du bruit et que tout le monde aurait quand même été en vie !!!

Après avoir dansé et chanté on a fini par aller se coucher ! On a bénéficié d’une place en auto qui nous a évité le métro ! Et une fois à l’appartement Morphée nous a emporté tout doucement. Au petit matin, mon bambin a sauté dans le bain et nous étions fins prêts à commencer une autre journée ! Une autre journée au cours de laquelle Petit Caillou allait découvrir le plaisir de discuter  avec toutes ces femmes rassemblées qui peu à peu commençaient à s’émerveiller ! Et oui le charme était en train d’opérer !
« Il est extraordinaire votre enfant ! »
« Il est toujours comme ça, je n’ai jamais vu ça? »
« C’est vraiment inspirant de vous voir avec votre enfant! »
« Il n’est vraiment pas dérangeant. »
On nous a accepté dans presque tous les ateliers… et oui une nous a refusé, sous prétexte que ce serait trop compliqué ! Compliqué pourquoi, ça on ne le saura jamais, si ce n’est que ça devait beaucoup la stresser d’avoir un bambin à proximité ! Mais d’autres ont proposé de m’accompagner pour m’aider, de lui prêté un petit tapis pour qu’il puisse se coucher et certaines ont même rigolé de ses réflexions éveillées ! Ainsi, on nous a observé, jugé, contemplé, questionné ? Mais qu’est ce que je faisais dans ce festival du féminin avec mon bambin ? C’est fou même à rassemblement sur la féminité sacrée on omettait la maternité ! Pourtant des ateliers s’y intéressaient, plusieurs femmes arboraient une grossesse avancée, mais les femmes étaient ici comme dans le reste de leur vie, coupées, amputées, divisées, partagées, tiraillées… Ainsi j’ai expliqué que nous venions de St-Loin du Loin Loin,  que j’allais donner une tente rouge ainsi qu’un atelier, et que du fait de l’allaitement il était impossible de se séparer. Mais peu importe l’allaitement prolongé, le sentiment de sécurité, le besoin de proximité, l’envie de partager, le désir de conjuguer. Le fait d’avoir à expliquer raconte à quel point nous avons oublié. Oublié que parents et enfants sont fait pour vivre ensemble et que cela peut être tellement satisfaisant. Oublié que Petit Caillou n’est pas une exception, mais que de nombreux autres enfants auraient réagis de la même façon. Oublié que la vie n’est pas obligée d’être morcelée, fragmentée, séparée par groupe d’âge, profession, obligation. Oublié que ce ne sont pas les enfants qui sont tannants, mais bien les adultes qui sont exigeants. Oublié que les enfants sont fait pour apprendre des grands, qui eux ont tout à gagner de ne pas oublier leur cœur d’enfant.

Ainsi pendant trois jours durant, on nous a témoigné de l’intérêt, nous nous sommes liés d’amitié, avons été appréciés et même remerciés … remerciés d’être venus de si loin pour donner un atelier, remercié d’être venus de si loin pour donner un atelier en compagnie d’un si charmant bambin qui a su faire rire, réfléchir, intriguer, questionner par le seul fait d’exister… de faire sa vie comme bon lui semblait au milieu d’un festival de la féminité. De faire sa vie comme bon lui semblait en étant bien entouré, veillé, accueilli par des gens qui au début n’étaient pas sûr d vouloir de lui et qui au final ont été séduits. De faire sa vie d’enfant de 4 ans en jouant, écoutant, tétant…  en suivant sa maman tout simplement !


PS Par contre je dois dire que si on ne sait plus vivre avec nos enfants ont sait encore prêter main forte aux mamans ! Un monsieur du métro s’est occupé de nous faire passer dans un guichet particulier, compte tenu de mon barda et fatras ! Un homme, deux hommes, trois hommes m’ont proposé de porter, ma valise bourrée ! Un autre s’est mis en travers de la porte du métro pour nous permettre d’embarquer ! Une dame a cédé son siège à Petit Caillou et fait le reste du trajet debout ! Une autre m’a aidé à me retrouver, tandis que j’hésitais quant à la sortie à emprunter ! Parvenus au collège où se tenait le festival, il nous restait encore trois étages à gravir avant de nous réjouir ! Un preux chevalier, s’est chargé de nos bagages dans l’escalier ! Et une fois revenus à notre St-Loin du Loin Loin, au milieu de la nuit avec un petit bambin endormi, le chauffeur d’autocar est venu déposer nos bagages jusque dans le coffre de la voiture, histoire de finir en beauté notre aventure !!!!


3 commentaires:

  1. Ah lala, toujours des commentaires, hein? Sérieux, moi non plus mon 4 ans n'aurait pas été tout tranquille, mais je ne suis pas "surprise" que Petit Caillou le soit, tous les enfants sont différents. Le mien trip à sauter partout, grimper, courir... ah et c'est un moulin à paroles, de très belles paroles! Mon petit Benjamin est plus comme Petit Caillou, lui. Si maman est là, il n'y pas vraiment besoin d'autres choses. Il adore faire des casse-têtes et tenir une couette de mes cheveux entre ses doigts :)

    Bien hâte de te lire sur le festival !

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  2. C'est sûr que les enfants aiment sauter et courir et aussi qu'ils sont tous différents ! Mais je suis certaines que tous, sinon la plupart sont tous capables d'être calmes pendant une heure... dans la mesure où calme ne veut pas dire ne pas exister ! Les adultes aussi ont bougé, toussé, joué avec leurs mains, gigoté leurs pieds et même décollé pour la lune de temps à autres quand ce n'était pas carrément du placotage entre eux !!! Sauf qu'on le tolère...

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  3. Beau témoignage! On a tout divisé dans notre société, ou presque, c'est triste quand même. Je ne pensais pas que même à cet endroit ça le serait. Merci d'être le changement aussi :)

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