mardi 17 mai 2016

Rituel pour renaitre d’un accouchement difficile

Je crois que l’on se rappelle toutes où nous étions le jour où nous avons découvert que nous étions enceinte. Dans la salle de bain après avoir fait pipi sur un petit bâton rose me direz vous ! Mais en fait je veux dire « où » à l’intérieur de nous… dans un état de surprise, d’euphorie, de bonheur, de doute, de peur, d’inquiétude, de perplexité, d’excitation. Et s’
il faut neuf mois pour faire un bébé, il faut aussi bien des mois pour faire une mère et cheminer vers le grand jour où ce bébé devra quitter notre ventre, cheminer dans notre antre, pour sortir entre nos jambes avant de revenir à notre ventre.

Un long chemin de réflexions, de remises en questions, d’accompagnement et de préparation pour finalement se sentir prête à emprunter ce chemin initiatique, ce rite de passage qu’est la mise au monde d’un enfant … et d’une mère. Un moment parfois craint, redouté, mais souvent rêvé, lu, questionné, discuté, imaginé, puis attendu. Un moment qui de plus en plus tend à permettre à la femme de renouer avec son féminin sacré, sa puissance, son essence, ainsi que la longue lignée qui l’unit aux femmes l’ayant précédée. Un moment que les femmes souhaitent de plus en plus se réapproprier pour s’affirmer, s’affranchir de certaines dérives médicales, honorer leur pouvoir, connecter à leur femme sauvage et aussi accueillir leur bébé dans un continuum de douceur, de bienveillance, de respect et de simplicité.

Mais il arrive des moments où la nuit devient longue, trop longue… où le cœur du bébé éprouve des difficultés, où la maman est aux confins de son propre chemin même si elle n’est pas encore arrivée. Il arrive des moments où il y a urgence, où il faut lâcher prise, et malheureusement dans l’urgence il y a rarement de douceur. Ainsi des femmes se retrouvent charroyée comme des marchandises, immobilisées, bardées de fils et de tuyaux, inondées d’ordres, pendant que leur cœur fond en larmes, que leur corps se fait mutiler et que leur âme prend peur… tellement peur qu’elle perd le contact avec le bébé… le bébé qui sortira bien fatigué de cette épopée et qui trop souvent sera rapidement emmailloté et emporté loin du ventre de sa maman épuisée, vidée, désemparée, humiliée. Une maman qui devra vivre avec la sensation d’avoir tout raté… d’avoir raté son accouchement, d’avoir raté la mise au monde de son enfant… d’avoir raté sa propre mise au monde. Et le pire en matière d’accouchement c’est que l’on ne peut pas se reprendre. On ne peut pas rembobiner le fil et recommencer. Il en est ainsi. Il en sera ainsi pour toute la vie. Pour toute la vie la femme, la mère aura à assumer… assumer son rêve brisé, assumer d’avoir malmené* son bébé,  assumer d’avoir nié son essence sacrée… assumer d’avoir cette histoire à raconter… assumer de pleurer et de pleurer encore toutes les larmes de son corps, alors qu’elle devrait être heureuse, comblée d’être sauve et d’avoir un si beau bébé.

A moins que …
À moins qu’elle puisse faire un rituel de remise au monde, de renaissance.
Chacune pourra le faire à sa façon.
Pour celles qui souhaitaient accoucher dans l’eau, on peut remplir la piscine ou le bain de nouveau, y parsemer des pétales de fleurs, mettre la musique que nous avions prévue. On pourrait faire la même chose dans notre lit, sur une couverture près du poêle à bois, dans une yourte ou un petit chalet isolé. L’idée c’est de recréer le cocon que l’on avait préparé. Une fois que tout est paré, il faut s’assurer d’être prête. Prête à faire le pas… celui de rebrousser chemin, de revisiter des espaces douloureux et de retisser son histoire. Pour commencer la femme peut pénétrer seule dans l’endroit ou accompagnée de son conjoint. Ce peut être l’occasion de revisiter toutes les émotions liées à l’évènement; les peurs, la colère, la douleur, les déceptions, de laisser couler toutes les larmes que l’on aura peut-être refoulées, de dire l’indicible. Ensuite peut arriver un temps pour accueillir, s’accueillir, laisser aller la culpabilité, les remords. Et puis vient le temps de chouchouter son corps malmené, d’apprivoiser les marques, les cicatrices, les raccommodements par des caresses, des mots doux, un dessin au henné… et enfin peut-être celui de se pardonner. Lorsque la femme est apaisée et se sent pleinement prête à  accueillir une nouvelle réalité, à revivre ce moment et à le célébrer, on peut apporter le bébé. Certaines femmes auront besoin de revivre leurs contractions, de gémir, d’imaginer la sensation de pousser… à chacune de se laisser aller pour se retrouver. Puis, au moment désiré on place l’enfant entre les jambes de la mère de façon à ce qu’elle puisse le cueillir et l’amener à elle… sur son ventre. Faire avec lui et son conjoint, ce qu’ils avaient prévu, espéré, rêvé.

Cela, certes, ne change pas la réalité, mais les rituels ont le mérite d’être un théâtre pour notre subconscient, permettant ainsi d’apaiser nos blessures, mais aussi et surtout de restituer son pouvoir à la mère, aux parents, en vivant une situation positive, en la ressentant au plus profond d’elle même, en honorant son chemin de déesse et plus tard en racontant son accouchement. Ainsi le récit de celui-ci pourra commencer par son chemin initié, rêvé, préparé, avant d’être dévié, pour finalement être ritualisé et en faire un évènement sacré, rempli de son identité, de ses fiertés, de sa bienveillance envers son bébé, de la proximité de son conjoint… un évènement rempli de sens où la peur pourra être remplacée par les réjouissances et … une renaissance.





* loin de moi l’idée de suggérer que certaines femmes malmènent leur bébé lors d’accouchement compliqué, il s’agit plutôt de l’émotion qu’il peut arriver d’éprouver.
* ces quelques mots constituent une trame de suggestion, libre à chacun de retirer des éléments et d’en ajouter ceux qui seraient plus appropriés ou porteurs. C’est toute la beauté du rituel; créer, retrouver le sens du sacré, selon nos besoins et souhaits !
*merci à Karine la sage femme qui m'a inspiré ce texte http://www.karinelasagefemme.com

Pour plus d'infos sur les rituels de grossesse, de maternité, de la vie de femme et de jeune fille, l'arrivée des premières règles, et le calendrier lunaire
www.chemins-de-traverse.ca

2 commentaires:

  1. je suggère également le seul livre francophone sur le sujet ;) http://www.nbouhiercharles.com/publications/rituels-de-femmes/ avec des idées pour "après" et des cas particuliers aussi dedans <3
    Il a été édité par les éditions La Plage mais j'ai désormais pris sa diffusion personnellement en mains :)
    <3

    RépondreEffacer
  2. Merci beaucoup pour ce lien. Je ne connaissais pas cet ouvrage !

    RépondreEffacer