
Levés de bon matin avec entrain, car nous allions avec ma
mère, au charmant poulailler de La crête en l’air ! Une odyssée que les enfants
attendaient depuis un moment, impatients, de ramener à la maison des petits
poussins qui auraient besoin de leurs soins. La dame qui nous a accueillies
était passionnée, dévouée à son petit poulailler. Elle nous a fait visiter,
nous a raconté ce qu’elle aimait, expliqué les croisements, accouplements,
incubations et nombreuses attentions, montré des coqs majestueux qu’elle
caressait avec volupté, des poules colorées haut perchées, des poussins dans
tous les coins, des œufs de toutes les couleurs … un vrai bonheur ! Jusqu’à ce qu’elle nous amène en arrière,
dans un petit enclos qui aurait pu être beau, mais dans lequel sévissaient
l’horreur et la peur. Un lot de petites poules blanches réchappées d’un pondoir
industriel, cruel, réformées après une année de ponte en accélérée, rejetées
juste après avoir été rentabilisées, juste avant que leur rendement ne
s’affaisse, que la courbe de croissance ne baisse. Promises à l’abattoir alors
qu’elles auraient pu prospérer encore quelques années, à un rythme un tout petit
peu moins effréné. Il faut le voir pour le croire, malgré la verdure et la
jolie cabane en bois, elles étaient là, une vingtaine de petites poules
agglutinées, déplumées, décharnées, usées. Les ongles tellement longs qu’elles
avaient du mal à marcher. La crête complètement décolorée… et tellement
effrayées, apeurées.
A la crête en l’air ils voulaient les sauver, les
réhabiliter, les intégrer à leur poulailler, leur offrir une vie de poule en
liberté. Malgré la difficulté à soutenir ce que l’on voyait, nous avons craqué
pour une de ces petites poules terrorisées. Chez nous elle pourrait vivre en
paix, on lui donnerait à manger des vrais grains concassés, sans la mettre au
piquet si elle ne nous donnait pas d’œufs à ramasser.
Lorsque nous sommes arrivés à la maison, ravis de notre
bonne action, nous l’avons lâchée dans notre poulailler et les catastrophes ont
commencées. Fidèle à son habitude le coq s’est précipité pour se l’approprier
et l’accoupler. Une façon comme une autre de faire connaissance, un procédé
auquel les autres poules n’offrent aucune résistance. Mais elle, notre poule
déplumée et séquestrée a pris peur et s’est sauvée. Sans doute se demandait-elle
ce qu’il venait de lui arriver. Elle a couru sans savoir où elle allait. En
courant nous aussi, nous avons réussi à la rattraper, enfin tout juste à
l’encercler pour l’encourager à regagner le poulailler. Malheureusement c’est
l’ânesse qui s’est pointée et de nouveau l’a effrayée. Comme une poule pas de
tête, complètement écervelée, elle a sauté, virevolté, foncé et c’est égarée …
dans la forêt. On l’a cherchée, appelée, appâtée en laissant des petits grains
concassés pour l’inciter à rentrer. On s’est encouragé en se disant que les
autres allaient l’appeler, la guider pour qu’elle puisse se situer. Mais à
l’heure qui l’est, notre poule terrorisée à qui nous voulions rendre sa liberté
s’est probablement fait dévorer par un renard affamé !
Nous étions désemparés… choqués, médusés, de constater à
quel point cette petite poule blanche n’avait pas eu de chance. Elle ne savait
tout simplement pas vivre autrement qu’avec des barreaux et nous l’avions tuée
avec nos idéaux. Il aurait fallu l’acclimater dans un enclos fermé, l’habituer
à la possibilité de bouger, lui laisser le temps d’apprivoiser la liberté, de
retrouver ses plumes, sa crête, sa dignité, sa légèreté… et la possibilité de
voler.
C'est bien triste!!
RépondreEffacerOh lala, que c'est triste :( Des poules maltraitées et dénaturées, incapables de vivre comme de vraies poules, ça me brise le coeur.
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