mercredi 6 août 2014

Voler dans les plumes



Oui aujourd’hui je vole dans les plumes de ceux qui ont des maudits poulaillers industriels, criminels, absolument non essentiels. Je savais que ça existait, mais je n’en avais jamais vu de près. Aujourd’hui les enfants et moi y avons été confrontés et bien que nous ayons voulu être empathiques cela s’est révélé pathétique… je vous explique !

Levés de bon matin avec entrain, car nous allions avec ma mère, au charmant poulailler de La crête en l’air ! Une odyssée que les enfants attendaient depuis un moment, impatients, de ramener à la maison des petits poussins qui auraient besoin de leurs soins. La dame qui nous a accueillies était passionnée, dévouée à son petit poulailler. Elle nous a fait visiter, nous a raconté ce qu’elle aimait, expliqué les croisements, accouplements, incubations et nombreuses attentions, montré des coqs majestueux qu’elle caressait avec volupté, des poules colorées haut perchées, des poussins dans tous les coins, des œufs de toutes les couleurs … un vrai bonheur !  Jusqu’à ce qu’elle nous amène en arrière, dans un petit enclos qui aurait pu être beau, mais dans lequel sévissaient l’horreur et la peur. Un lot de petites poules blanches réchappées d’un pondoir industriel, cruel, réformées après une année de ponte en accélérée, rejetées juste après avoir été rentabilisées, juste avant que leur rendement ne s’affaisse, que la courbe de croissance ne baisse. Promises à l’abattoir alors qu’elles auraient pu prospérer encore quelques années, à un rythme un tout petit peu moins effréné. Il faut le voir pour le croire, malgré la verdure et la jolie cabane en bois, elles étaient là, une vingtaine de petites poules agglutinées, déplumées, décharnées, usées. Les ongles tellement longs qu’elles avaient du mal à marcher. La crête complètement décolorée… et tellement effrayées, apeurées.
A la crête en l’air ils voulaient les sauver, les réhabiliter, les intégrer à leur poulailler, leur offrir une vie de poule en liberté. Malgré la difficulté à soutenir ce que l’on voyait, nous avons craqué pour une de ces petites poules terrorisées. Chez nous elle pourrait vivre en paix, on lui donnerait à manger des vrais grains concassés, sans la mettre au piquet si elle ne nous donnait pas d’œufs à ramasser.
Lorsque nous sommes arrivés à la maison, ravis de notre bonne action, nous l’avons lâchée dans notre poulailler et les catastrophes ont commencées. Fidèle à son habitude le coq s’est précipité pour se l’approprier et l’accoupler. Une façon comme une autre de faire connaissance, un procédé auquel les autres poules n’offrent aucune résistance. Mais elle, notre poule déplumée et séquestrée a pris peur et s’est sauvée. Sans doute se demandait-elle ce qu’il venait de lui arriver. Elle a couru sans savoir où elle allait. En courant nous aussi, nous avons réussi à la rattraper, enfin tout juste à l’encercler pour l’encourager à regagner le poulailler. Malheureusement c’est l’ânesse qui s’est pointée et de nouveau l’a effrayée. Comme une poule pas de tête, complètement écervelée, elle a sauté, virevolté, foncé et c’est égarée … dans la forêt. On l’a cherchée, appelée, appâtée en laissant des petits grains concassés pour l’inciter à rentrer. On s’est encouragé en se disant que les autres allaient l’appeler, la guider pour qu’elle puisse se situer. Mais à l’heure qui l’est, notre poule terrorisée à qui nous voulions rendre sa liberté s’est probablement fait dévorer par un renard affamé !
Nous étions désemparés… choqués, médusés, de constater à quel point cette petite poule blanche n’avait pas eu de chance. Elle ne savait tout simplement pas vivre autrement qu’avec des barreaux et nous l’avions tuée avec nos idéaux. Il aurait fallu l’acclimater dans un enclos fermé, l’habituer à la possibilité de bouger, lui laisser le temps d’apprivoiser la liberté, de retrouver ses plumes, sa crête, sa dignité, sa légèreté… et la possibilité de voler.

2 commentaires:

  1. Oh lala, que c'est triste :( Des poules maltraitées et dénaturées, incapables de vivre comme de vraies poules, ça me brise le coeur.

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